Même si l'e-acheteur n'est pas un trader, il est néanmoins confronté - et plus encore avec ses nouveaux outils de BI - à une certaine virtualisation de la relation avec ses fournisseurs. « On a souvent une vision caricaturale des achats : on imagine que l'acheteur serre le cou des fournisseurs quand ça va mal, met en garde Bruno Pillon, le directeur général de BravoSolution. L'application d'un plan d'action ne consiste pas à arriver chez le fournisseur en lui demandant -30%. Avec cette stratégie, vous n'aurez pas de grandes chances d'atteindre vos objectifs de réduction. »
Concrètement, les services achats mettent en place deux types de plans de recadrage. Le plan de progrès constitue la situation la plus souhaitable pour les deux parties. Il est déclenché en amont, grâce à un suivi régulier des fournisseurs. « Ce plan vise à améliorer la performance opérationnelle d'un fournisseur. Il est décidé avec son accord, pour corriger des problèmes constatés » explique Gabriel Giret, chef de pôle Projet au sein d'Ivalua. Contractualisé, le plan de progrès prévoit des axes d'optimisation sur une ou plusieurs années.
Dans le shaker décisionnel
Le plan d'action, quant à lui, est déclenché pour des raisons multiples, souvent en situation d'urgence, et pour appliquer une décision stratégique : il vise soit une réduction des coûts, soit une meilleure qualité de livraison, soit une amélioration des délais, soit un ensemble d'objectifs. C'est la réponse opérationnelle à une notification de dégradation. Et c'est là d'ailleurs que les outils informatiques s'avèrent précieux. « Si vous ne disposez que de tableaux Excel pour préparer votre plan d'action, il vous sera très difficile de décider d'actions cohérentes », poursuit Bruno Pillon.
Car le mixage décisionnel s'impose pour comprendre en finesse sur quels leviers il va falloir jouer. La connaissance de la dépense, les familles d'achat travaillées, la situation du marché et les indices extérieurs : tous ces éléments sont censés être mixés dans la moulinette décisionnelle pour ne pas commettre d'impairs. Une fois l'alchimie - humaine et informatique - opérée, le plan d'action est lancé. Il constitue d'ailleurs « un outil de management pour les directeurs achats, qui demandent par exemple la mise en concurrence de fournisseurs, l'amélioration du sourcing, la recherche d'un meilleur prix ou d'un autre matériel », constate Gabriel Giret.
Une main tendue et intéressée
Tout va donc le mieux dans le meilleur des mondes si on est bien équipé. Oui, mais comment tout ça se concrétise-t-il sur le terrain ? « Une des voies consiste à reconsulter le marché. Une autre voie se résume à de demander aux prescripteurs internes s'il ont réellement besoin de cet élément ou de ce service. Et le dernier levier est de mettre la pression à l'externe : d'aller voir le fournisseur, à qui il faudrait demander -30%, et de travailler avec lui pour définir ensemble pourquoi ce produit coûte cher. Une grande entreprise a ainsi choisi de travailler avec l'un de ses fournisseurs stratégiques, en lui déléguant des experts pour l'aider à améliorer ses coûts. C'est une solution où tout le monde sort gagnant : l'acheteur bien sûr qui a atteint son objectif mais aussi le fournisseur, qui a bénéficié d'une forte amélioration de ses coûts, et ce pour tous ses clients », explique Bruno Pillon. D'autres leviers permettent d'aider un fournisseur à ne pas s'enfoncer dans une situation critique : comme de lui ouvrir ponctuellement des facilités de paiement, de régler à réception de facture, plutôt qu'à 60 jours.
Quand l'éthique n'est pas automatique
Sur certains marchés sensibles ou fragilisés par un nombre réduit de fournisseurs, la défaillance d'un prestataire peut provoquer un tsunami chez le donneur d'ordres : une pénurie de pièces et/ou une envolée soudaine des coûts. Si bien que certains industriels choisissent de faire tourner tout le système achat autour du référentiel fournisseurs. « Le risque fournisseur est ainsi géré au quotidien et une équipe contrôle les conséquences des décisions prises », précise Gabriel Giret d'Ivalua. Là encore, les outils d'e-achat aident à prévenir la casse. Mais ce qu'ils ne présagent pas, c'est le niveau d'éthique des entreprises ach