La crise de 2008 et les révolutions du Moyen-Orient ont-elles mis en exergue le risque fournisseurs ?
Cela a surtout montré l'importance de bien identifier le risque fournitures. Je préfère ce terme à celui de risque fournisseurs. En effet, pour évaluer ce type de risque, on ne prend pas en compte uniquement la bonne santé et la performance du fournisseur. On étudie aussi la zone géographique dans laquelle se situe le fournisseur. La volatilité de certaines monnaies, la stabilité politique du pays, le respect aux noms des droits du travail et de l'enfant, sont par exemple des critères à prendre en compte. Enfin, on se penche sur des éléments de la supply chain. Certaines familles d'achat peuvent être volatiles, indexées sur le prix du pétrole.
Cela signifie que, avant de parler de gestion de risque, il faut être capable de disposer d'une analyse fine des dépenses ?
Exactement, et cela explique pourquoi certaines entreprises au moment de la crise n'ont pas été en capacité de réagir face à des défaillances de fournisseurs. Ce n'est qu'une fois menées une cartographie et une analyse précise des dépenses que vous serez en mesure d'anticiper certains risques. Imaginons par exemple que vous achetiez à une seule source qui est fortement dépendante de vous. Vous pouvez vous attendre, en cas de crise, à une baisse de votre propre business et à une défaillance induite de votre fournisseur. Si cette situation de risque a été identifiée, il est possible d'anticiper en recherchant une seconde source. Un autre exemple assez significatif porte sur l'acheminement des achats. Les transporteurs ont en effet beaucoup souffert pendant la crise. Or, si vous maîtrisez votre propre transport, vous ne maîtrisez pas celui de votre fournisseur. Vous pouvez ainsi, ce risque identifié, choisir d'assurer vous-même le transport.
Les entreprises capables de cartographier précisément leurs risques, de les évaluer et de les gérer sont-elles à l'abri de nouvelles crises ?
La gestion de la diminution des risques, la mitigation, n'est jamais terminée ! Car l'entreprise change, ses produits évoluent, elle s'installe dans de nouveaux pays, ses fournisseurs grandissent ou disparaissent. Cela signifie que les données de la dépense évoluent en permanence. Ceci dit, les entreprises équipées sont assurément mieux armées. Ces entreprises ont pu, par exemple en Tunisie, évaluer rapidement l'impact de la révolution sur leurs fournisseurs. Et le cas échéant mieux réagir ou anticiper.