Il a tout au plus 12 ans. Ses pré-requis sont la maîtrise de l’anglais et d’Internet. Oui,le métier d’« e-acheteur » est bien né du web et de l’engouement de début de siècle pour les places de marchés électroniques où les grands donneurs d’ordres se connectaient à leurs sous-traitants. Depuis cette époque (bénie ?), les acheteurs se scindent en deux catégories. Les seniors qui se sont formés sur le tas aux outils de e-sourcing, e-procurement et SRM installés par leurs entreprises. Les juniors, dotés "nativement" d’une affinité certaine à l’outil informatique, ont quant à eux suivi les cursus achat de leur école ou un master universitaire, leur transmettant le sésame de l’univers des processus achats outillés. Par exemple, le master ingénierie et management des achats (IMA) du pôle universitaire Leonard de Vinci aborde les outils technologiques autour de trois grands piliers : la maîtrise des outils bureautiques comme Excel et PowerPoint, les techniques de recherche d’information sur Internet et usage des bases de données, et enfin un panorama des solutions e-achats et des acteurs de ce marché. « Les étudiants seront amenés à utiliser ces outils dans le cadre de la mise en place de nouvelles procédures dans l’entreprise, un plan de gestion de progrès fournisseur ; le suivi des profils responsabilité sociétale des entreprises ou la gestion des risques », précise Arnaud Salomon, le directeur du MBA-IMA au pôle universitaire Leonard de Vinci.
Professionnalisation de la fonction et crise économique
L’apparition de l’e-acheteur a aussi coïncidé avec la professionnalisation de la fonction achat et la prise en compte stratégique de cette fonction pour réduire les coûts de l’entreprise durant les cycles de récession économique comme l’après 11 septembre 2001 ou plus tard la crise des « subprimes ». Des périodes charnières incitant à la maîtrise de la dépense « Avant on atterrissait au service achat au bénéfice d’une promotion ou d’une réaffectation sans avoir une réelle vocation pour ce poste. Depuis, la professionnalisation est passée dans toutes les directions, dont celle des achats » confirme Mohssin Bekkaoui, consultant Acxias, cabinet de conseil spécialisé dans l’organisation et le pilotage de projets Performance Achats. Comme toute informatisation, celle de la fonction achat a d’abord consisté à libérer l’acheteur de tâches chronophages (dépouillement des offres grâce aux réponses dématérialisées, gestion des appels d’offre, référencements fournisseurs, des contrats, des budgets), recouvrant du temps pour la négociation et sa préparation.
Évolution vers l’analyse des données
« Pour que l’acheteur puisse remplir efficacement sa mission de doter l’entreprise des « meilleurs contrats » avec le marché, il dispose de deux types d’outils. Les outils dits « transactionnels », comme par exemple le e-procurement au sens large, organisent et automatisent le processus commande-paiement et font une promesse de productivité. Et les outils dits « décisionnels » qui, outre leur contribution à cette première promesse, visent l’accroissement de la performance grâce à la maîtrise de l’information » indique Isabelle Catry, directrice sourcing france chez Factea Sourcing conseil en amélioration de la performance achat. Mais une fois le contrat négocié, il doit maîtriser la diffusion des produits, des matières ou des prestations achetées, il devra mesurer l’écart entre ce qui est négocié et ce qui est réellement livré. Il vérifiera que la politique achat de l’entreprise est bien déployée grâce aux reporting internes. Il sera force de proposition dans le choix de nouveaux fournisseurs, il consultera les clients internes par le biais d’enquêtes sur l’intranet par exemple, pour comprendre leur perception des fournisseurs et la satisfaction de leur besoins. « Les outils sont aujourd’hui une condition nécessaire mais pas suffisante de la performance achats. Ils ne remplacent pas la régénération des politiques et des processus achats, ils les facilitent.
Ils ne font pas l’arbitrage, ils l’alimentent. Ils ne dédouanent pas l’acheteur d’interactions directes avec les fournisseurs ou les clients internes, ils les rendent plus efficaces » ajoute-t-elle.
Capacités d’analyse et flair seront tout autant appréciés que son brio dans la conduite des négociations. Il est devenu un maillon prépondérant du processus achat. « Le fournisseur doit devenir un vecteur de compétitivité de l’entreprise et un apport d’innovation. Pour répondre aux nouveaux enjeux de la fonction achat, l’acheteur doit analyser ce qui se passe à l’intérieur et à l’extérieur, comprendre son marché, la gestion des saisons, les plans de progrès à moyen et long termes, avoir le sens économique » complète Arnaud Salomon.
Une éthique indispensable sur le Web
L’e-acheteur se doit d’être irréprochable dans sa pratique du Net. Il connait sur le bout des doigts les codes de bonne conduite de la relation entre acheteur et fournisseur, incidemment rappelés dans des chartes édictées en interne mais aussi par le législateur venu mettre de l’ordre dans les pratiques (Loi Jacob en 2005) suite aux dérives des enchères électroniques inversée